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Version électronique 1998 Manuel de l'OTAN

 
Politique et prise de décisions

La dimension de défense

La planification de la défense de l'OTAN repose sur les principes de base de la sécurité collective dans son ensemble : la solidarité politique entre les pays membres, le renforcement de la collaboration et des liens entre eux, dans tous les domaines où cette coopération sert les intérêts de tous et de chacun, le partage des rôles et des responsabilités et la reconnaissance des engagements réciproques, et la résolution commune de maintenir des forces armées suffisantes pour appuyer la stratégie et la politique de l'Alliance.

Dans l'environnement politique et stratégique actuel de l'Europe, plus encore que par le passé, l'Alliance ne réussira à préserver la paix et à prévenir la guerre que si elle pratique avec efficacité une diplomatie préventive et une gestion des crises affectant la sécurité. Les aspects politiques, économiques, sociaux et environnementaux de la sécurité et de la stabilité prennent donc une importance croissante.

La dimension de défense de l'Alliance n'en reste pas moins indispensable et contribue au maintien de la stabilité en Europe ainsi qu'à la gestion des crises. La réorganisation des forces de l'Alliance depuis la fin de la Guerre froide permet maintenant à l'OTAN de réagir à une gamme beaucoup plus large de circonstances. Cependant, le maintien d'un potentiel militaire suffisant et la volonté clairement affirmée d'agir collectivement pour la défense commune demeurent essentiels pour atteindre les objectifs de l'Alliance en matière de sécurité. En dernier ressort, ce potentiel, associé à la solidarité politique, vise à prévenir toute tentative de coercition ou d'intimidation et à faire en sorte qu'aucune agression militaire contre l'Alliance ne soit jamais perçue comme une option ayant la moindre chance de succès, ce qui garantit la sécurité et l'intégrité territoriale des pays membres et protège l'Europe dans son ensemble des conséquences de toute menace visant l'Alliance.

S'agissant de déterminer l'importance et la nature de leur contribution à la défense collective, les pays membres de l'OTAN conservent leur entière souveraineté et leur totale liberté d'action. Cependant, les caractéristiques de la structure de défense de l'OTAN exigent que, dans leurs décisions, les gouvernements tiennent compte des besoins globaux de l'Alliance. C'est pourquoi ils suivent des procédures agréées de planification de la défense qui fournissent les méthodes et les mécanismes d'évaluation des forces nécessaires à la mise en oeuvre des politiques de l'Alliance, à la coordination des plans de défense nationaux et à l'établissement d'objectifs de planification des forces répondant aux intérêts de l'Alliance tout entière. La planification prend en compte de nombreux facteurs, notamment la nouvelle donne politique, les évaluations établies par les commandants de l'OTAN concernant les forces requises pour remplir leurs missions, l'évolution de la technologie, l'importance d'une répartition équitable des rôles, des risques et des responsabilités au sein de l'Alliance, ainsi que les possibilités économiques et financières des différents pays. Ce processus permet d'examiner conjointement tous les éléments pertinents, afin d'utiliser au mieux les ressources nationales collectives disponibles pour la défense.

Un échange annuel d'informations sur les plans des pays assure une étroite coordination entre les services du Secrétariat international et de l'Etat-major militaire international, les autorités militaires de l'OTAN et les gouvernements des pays membres. Il permet de comparer les intentions de chaque pays aux besoins d'ensemble de l'OTAN et, en cas de nécessité, de les adapter à la lumière de nouvelles directives politiques ministérielles, des exigences de modernisation et des changements affectant les rôles et les responsabilités des forces elles-mêmes. Tous ces aspects sont constamment tenus à l'étude et font l'objet d'un examen critique à chaque stade du cycle des plans de défense.

Un réexamen du processus des plans de défense de l'OTAN a été effectué dans le cadre de l'adaptation de l'Alliance. Ses conclusions ont été entérinées par les Ministres en juin 1997. Un processus unique, cohérent et rationalisé a été mis en place pour permettre à l'OTAN de continuer à constituer les forces et les capacités nécessaires à la conduite de toute la gamme des missions de l'Alliance. Il s'agit notamment de l'apport d'un soutien aux opérations qui pourraient être dirigées par l'Union de l'Europe occidentale (UEO) dans le cadre de l'Identité européenne de sécurité et de défense (voir le chapitre 3). Dans ce cadre également, le processus permet, au sein de l'Alliance, d'aider tous les Alliés européens dans l'établissement de leurs plans relatifs à la conduite d'opérations dirigées par l'UEO.

Ces dernières années, le processus d'établissement des plans de défense a eu pour point de départ le Concept stratégique adopté en 19911, qui expose en termes généraux les objectifs de l'Alliance et les moyens de les atteindre. Les Ministres de la défense donnent tous les deux ans des instructions plus détaillées, dans un document intitulé «Directive ministérielle». Cette Directive donne des orientations sur les plans de défense en général et sur les plans de forces en particulier. Elle porte sur les facteurs politiques, économiques, technologiques et militaires qui pourraient affecter l'évolution des forces et des capacités des Alliés, et elle définit les priorités et les domaines de préoccupation dont doivent s'inspirer, d'abord les autorités militaires de l'OTAN dans l'établissement de leurs objectifs de forces, puis les pays dans leur propre planification. Elle traite des plans concernant les forces et les capacités requises à la fois pour la défense collective et pour les circonstances ne relevant pas de l'article 5 du Traité de Washington2. Elle apporte également, le cas échéant, des orientations relatives à la coopération avec d'autres organisations. Après le réexamen du processus d'établissement des plans de défense de l'Alliance, la Directive ministérielle inclut maintenant une section distincte contenant des directives politiques de l'Union de l'Europe occidentale (UEO), qui définissent la portée probable des opérations dirigées par celle-ci. Tous les Alliés étant impliqués, d'autres éléments de la Directive ministérielle tiennent aussi compte des besoins de l'UEO. Des objectifs de planification spécifiques pour les forces armées de chaque pays membre sont établis à partir de cette directive. Il s'agit des «Objectifs de forces», qui couvrent généralement une période de six ans, mais vont plus loin dans certains cas. Comme la Directive des Ministres de la défense, ils sont actualisés tous les deux ans.

Les plans de défense alliés sont examinés chaque année, et les Ministres de la défense donnent des instructions à leur sujet dans un «Examen annuel de la défense». En réponse à un Questionnaire des plans de défense (DPQ) diffusé tous les ans, les gouvernements des pays membres préparent et soumettent à l'Alliance leurs plans de forces et leurs prévisions en matière de dépenses de défense pour les cinq années couvertes par l'examen. L'Examen annuel de la défense est conçu pour évaluer la contribution des pays membres à la défense commune en fonction de leurs possibilités et contraintes respectives, et dans le cadre des Objectifs de forces qui leur sont fixés. Il s'agit in fine de compiler un plan de forces OTAN commun qui est à la base des plans de défense de l'OTAN pour une période de cinq ans. L'Examen de la défense a été adapté dans le cadre de celui du processus des plans de défense de l'OTAN. A l'automne des années impaires, une actualisation limitée des plans de défense sera réalisée sur la base d'un Questionnaire des plans de défense mis à jour et plus réduit. Un examen complet sera effectué à l'automne des années paires. L'actualisation sera normalement d'une ampleur limitée et ne tiendra compte que des modifications importantes intervenues dans les plans de chacun des Alliés.

Les réponses des pays au Questionnaire des plans de défense sont examinées simultanément par le Secrétariat international (SI) et les autorités militaires de l'OTAN. Le SI rédige le projet des «Chapitres par pays» pour chacun des membres de l'Organisation. Ces chapitres font apparaître en détail toutes les divergences non résolues entre les Objectifs de forces de l'OTAN et les plans des pays, y compris le degré de conformité des plans nationaux aux besoins des opérations dirigées par l'UEO. Ils indiquent si les pays ont respecté, ou prévoient de respecter, leurs engagements de forces pour l'année en cours. Toutes les lacunes sont expliquées, et les efforts nationaux sont évalués par rapport aux capacités et contraintes respectives. Les projets des Chapitres par pays sont complétés par des évaluations des Hauts Commandants de l'OTAN axées sur les capacités des forces en fonction de leurs besoins et missions opérationnels. Dans les années «d'actualisation», les projets des Chapitres par pays et les évaluations des Grands commandements seront mis à jour, compte tenu uniquement des changements signalés par rapport à l'année précédente.

Les projets de Chapitres par pays sont étudiés dans le cadre d'«examens multilatéraux». Ceux-ci ont pour but d'établir dans quelle mesure les pays ont rempli leurs engagements de forces pour l'année en cours. Ils visent particulièrement à éliminer les différences éventuelles entre les plans de forces des pays et les Objectifs ou plans de forces de l'OTAN. Ils sont également destinés à permettre de voir dans quelle mesure les plans de certains Alliés pourraient être utilisés pour les besoins des opérations dirigées par l'UEO, et à contribuer à la coordination des plans de défense des différents Alliés.

A la lumière des Chapitres par pays et d'une évaluation du Comité militaire, un Rapport général est soumis au Comité des plans de défense. Il recommande l'adoption par les Ministres de la défense d'un plan de forces quinquennal de l'OTAN et examine l'équilibre, la faisabilité et l'acceptabilité d'ensemble du plan de forces. Il comporte également des sections sur le respect par les pays de leurs engagements pour l'année en cours, ainsi qu'une évaluation des progrès réalisés pour ce qui est des objectifs globaux et des orientations spécifiques figurant dans la Directive ministérielle, y compris celles qui ont trait aux besoins des opérations dirigées par l'UEO. Une fois approuvé par le Comité des plans de défense, le Rapport général pourrait aussi offrir à l'Union de l'Europe occidentale une possibilité de se prononcer sur les aspects du plan de forces quinquennal de l'OTAN relatifs à ses besoins. Dans les années «d'actualisation» sera établi un Rapport général décrivant dans leurs grandes lignes les conséquences globales de tout changement important dans les plans des Alliés. Des dispositions similaires seront prises pour les consultations avec l'UEO en ce qui concerne le Rapport général sur l'ensemble de l'Examen de la défense.

Dans le cadre des consultations de l'Alliance, des consultations «hors cycle» supplémentaires avec les Alliés sont nécessaires lorsqu'un pays envisage de modifier sensiblement ses engagements et ses plans approuvés par les Ministres lors du processus d'Examen de la défense et des Objectifs de forces. Cette nécessité existe également lorsque le calendrier des prises de décisions nationales empêche l'étude de ces modifications dans l'Examen de la défense suivant.


1 Au Sommet de Madrid, en juillet 1997, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont lancé un réexamen du Concept stratégique, afin de l'actualiser si nécessaire. Le Conseil a entériné le mandat relatif à ce réexamen en décembre 1997, et a décidé que les résultats des travaux devraient être présentés aux Chefs d'Etat et de gouvernement à leur prochain Sommet, en avril 1999.

2 L'article 5 du Traité de l'Atlantique Nord vise essentiellement à dissuader quiconque d'utiliser la force contre les membres de l'Alliance et pose en principe qu'une attaque contre l'un ou plusieurs d'entre eux sera considérée comme une attaque dirigée contre tous les membres. Les activités de l'Alliance qui n'entrent pas dans le cadre de l'article 5 sont appelées collectivement «opérations ne relevant pas de l'article 5".


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