Les communications numériques sous-marines entrent dans une nouvelle ère

  • 27 Apr. 2017 -
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  • Mis à jour le: 08 May. 2017 10:30

Grâce aux satellites et aux téléphones portables, qui sont conçus selon des normes internationales, nous vivons aujourd’hui dans un monde interconnecté. Cependant, les technologies de communication que nous utilisons sur la terre ferme ne fonctionnent pas bien sous l’eau. Consciente que l’eau recouvre plus de 70 % de la surface du globe, l’OTAN a financé des travaux de recherche visant à établir la toute première norme de communication numérique sous-marine.

The NATO STO Centre for Maritime Research and Experimentation (CMRE) based in La Spezia (Italy) is working to enhance Allied robotic capabilities at sea and under the sea. Experimentation includes tests with autonomous underwater vehicles (AUVs), such as the one in the picture, and the development of new solutions to empower networks of robots and enable full interoperability among underwater assets. In the picture: an Ocean Explorer AUV being recovered from the NATO Research Vessel Alliance during a sea trial.

Qu’il s’agisse d’informer un plongeur sous-marin qui remonte à la surface de la présence d’une embarcation à proximité, de permettre à un submersible de communiquer avec un poste de commandement basé à terre, ou encore de faire en sorte qu’une plateforme pétrolière soit avertie par un robot sous-marin lorsqu’une fuite est détectée, les possibilités d’application des moyens de communication sous-marine sont illimitées.

Ces moyens de communication pourraient être utilisés dans de nombreux domaines, tels que la protection portuaire, la surveillance maritime, la détection des mines, la supervision des parcs d’éoliennes et des pipelines en mer, ou même l’archéologie sous-marine.

Le Centre pour la recherche et l'expérimentation maritimes (ou CMRE, voir ci-dessous pour plus d’informations), qui relève de l’Organisation OTAN pour la science et la technologie, a élaboré la norme de communication acoustique sous-marine JANUS, qui, depuis le 24 mars 2017, est reconnue comme une norme OTAN par l’ensemble des Alliés. Ce protocole de communication numérique sous-marine est le premier à bénéficier d’une reconnaissance au niveau international et il ouvre la voie au développement de multiples applications prometteuses dans le domaine de la communication sous-marine.

Un réseau de robots des mers

Le CMRE s’emploie à mettre au point des réseaux efficaces de communication sous‑marine afin de permettre à des robots sous-marins de travailler ensemble et de communiquer leurs données à la station dont ils dépendent (voir l’infographie sur les communications numériques sous-marines en réseau).

« Les robots sont capables de faire preuve d’une certaine forme d’intelligence et de travailler en équipe », indique João Alves, scientifique principal et chef de projet au CMRE. « Par exemple, l’un des robots pourrait repérer quelque chose d’intéressant et avertir le reste de l’équipe ».

À condition que les communications sous-marines soient efficaces, ces robots peuvent agir en toute autonomie, sans qu’une intervention humaine directe soit nécessaire. Le cas échéant, l’opération peut être pilotée par des ingénieurs qui supervisent l’ensemble des communications depuis une salle de commande et de contrôle basée à terre. La communication avec la terre ferme s’effectue par l’intermédiaire de bouées relais situées à la surface de l’eau et capables d’établir des liaisons radio vers des plateformes locales ou des satellites.

« C’est particulièrement important pour les opérations de recherche et sauvetage », explique John Potter, scientifique au Bureau de développement stratégique du CMRE. « Les véhicules autonomes sont assez peu onéreux et, puisqu’il s’agit de systèmes sans pilote, on peut leur confier des tâches ingrates ou dangereuses.»

« On sait que les sons ont un impact sur la faune et la flore marines », déclare João Alves.  Conscient de ce risque, le Centre s’associe à des biologistes et à d’autres scientifiques pour veiller à la protection du milieu marin. 

Pour l’essentiel, ces travaux de développement sont menés au sein du Réseau d’observation des littoraux océaniques (Littoral Ocean Observatory Network, ou LOON – voir ci-dessous pour plus d’informations). Le LOON est une installation d’essai située dans le port de La Spezia, en Italie. Il joue un rôle primordial dans le cadre des projets de l’OTAN, dont un grand nombre sont conçus en partenariat avec la Commission européenne. 

Le CMRE fait appel au LOON pour mettre au point et tester des solutions de communication permettant à des robots sous-marins d’assurer la protection et la surveillance des océans et des fleuves.

JANUS, langage sous-marin normalisé

Pour que les moyens sous-marins puissent communiquer entre eux, il faut des normes communes.« En surface, il nous suffit de connecter nos appareils à un point d'accès WiFi sans avoir à nous soucier de la compatibilité », déclare João Alves. Et d'ajouter : « Il n'existait jusqu'il y a peu aucun dispositif un tant soit peu similaire pour le domaine sous‑marin ».

Comme cela s'est fait dans le secteur des communications sans fil, il a fallu définir une norme pour assurer l'interopérabilité des équipements sous-marins provenant de constructeurs différents.

Ces dix dernières années, le CMRE a travaillé à l'élaboration du premier protocole international de communication numérique sous-marine, connu sous le nom de JANUS, qui est désormais une norme agréée OTAN.

« Janus est le dieu romain des passages et des portes », explique John Potter. « D'où le nom JANUS, car ce langage jette un pont entre deux domaines, deux paradigmes d'exploitation différents, ouvrant ainsi la voie au dialogue ».

John Potter précise : « Ce système de signalisation numérique sous-marine permet d'entrer en contact avec des équipements sous-marins utilisant un format commun, de signaler la présence d'un appareil en vue de réduire les conflits, et de laisser un groupe de moyens sous-marins (robots, sous-marins, plongeurs ou tout autre dispositif submersible) interagir au sein d'un même réseau ».

S'il venait à être adopté à l'échelle mondiale, le protocole JANUS pourrait garantir l'interopérabilité des équipements civils et militaires, OTAN et non OTAN, en leur offrant un langage commun pour communiquer entre eux et fonctionner de concert.

JANUS a fait l'objet de nombreux essais en mer lors d'exercices associant plusieurs partenaires (universités, industries et instituts de recherche) et portant sur divers scénarios d'utilisation. L'étroite collaboration avec les pays membres de l'OTAN s'est avérée particulièrement fructueuse en permettant de développer le langage JANUS pour des emplois susceptibles d'améliorer la sécurité des opérations maritimes.

Ainsi, la marine portugaise travaille en ce moment avec le CMRE à la mise au point de nouveaux concepts pour l'échange d'informations cruciales avec les sous-marins (ce qui n'est d'ordinaire possible qu'en surface par onde radio), par exemple celles qui concernent la localisation de navires se trouvant dans les parages. Les travaux menés actuellement portent aussi sur l'échange de données numériques à l'appui des opérations de sauvetage en cas d'incident impliquant un sous-marin.

INFORMATIONS DE BASE

Réseau d'observation des littoraux océaniques (LOON) – un banc d'essai sous-marin

  • LOON – un banc d'essai en ligne et peu coûteux qui est accessible en permanence – permet aux utilisateurs (institutions internationales, groupes de recherche et entités commerciales) à travers le monde de tester des dispositifs de communication sous-marine.
  • Des équipements de communication acoustique déployés au fond de l'océan forment un réseau acoustique sous-marin.
  • Les nœuds du réseau sont reliés au rivage au moyen de câbles, ce qui offre aux ingénieurs et aux chercheurs des possibilités de commande à distance.
  • Ce banc d'essai a été abondamment utilisé pour la mise au point de JANUS et les travaux de recherche du CMRE relatifs aux communications sous-marines.

Centre OTAN pour la recherche et l'expérimentation maritimes (CMRE)

  • Installé à La Spezia (Italie), le CMRE organise et mène des travaux de recherche scientifique et de développement technologique axés sur le domaine maritime, et propose ainsi des solutions scientifiques et technologiques novatrices, éprouvées sur le terrain, afin de répondre aux besoins de l'OTAN en matière de sécurité et de défense.
  • Il s'agit d'un organe exécutif de l'Organisation OTAN pour la science et la technologie.
  • Le Centre exploite les deux navires de recherche de l'OTAN qui permettent l'étude et la mise au point de solutions scientifiques et technologiques en mer.