Discours
du secrétaire général de l'OTAN, M. Jaap de Hoop Scheffer, au Collège de défense de l'OTAN, Rome
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Commandant,
Excellences,
Chers officiers,
Mesdames, Messieurs,
Depuis hier, j’effectue ce qui, dans la pratique, constitue ma visite d’adieu à l’Italie en tant que secrétaire général de l’OTAN. Je suis très heureux que nous ayons pu inclure dans mon programme un bref arrêt au Collège de défense de l'OTAN, ce qui me donne l'occasion d'adresser mes sincères remerciements au Collège et à son personnel.
Dès sa création, en 1951, le Collège de défense de l’OTAN a été le principal établissement d'enseignement de l'Organisation. Le rôle du Collège a considérablement évolué ces dernières années, parallèlement à celui de l'OTAN elle‑même. Et tandis que l’Alliance continue de rechercher de nouvelles approches face aux défis d’aujourd’hui et de demain, je suis convaincu que le Collège a un rôle important à jouer à l’appui de ces efforts.
Cela concerne en particulier l’élaboration d’un nouveau concept stratégique pour l’OTAN, processus lancé le mois dernier par nos chefs d’État et de gouvernement au sommet du 60e anniversaire de l’Alliance. Et c’est sur ce défi – définir le rôle et les responsabilités de l’OTAN à plus long terme, dans un environnement stratégique qui évolue rapidement – que porteront principalement mes observations d’aujourd'hui.
Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles nous avons besoin d’un nouveau concept stratégique. La première est que le concept actuel a été approuvé en 1999, lorsque l’Alliance comptait 16 pays membres, alors qu’elle en compte désormais 28. De nombreux aspects du concept actuel restent bien entendu pertinents. Mais ce concept ne tient pas compte d’événements politiques et de sécurité majeurs survenus au début du 21e siècle, tels que le 11 septembre et l’engagement de l’OTAN en Afghanistan. En conséquence, le concept actuel ne reflète pas l’immense transformation subie par l’Alliance, qui est passée d’une Alliance « eurocentrique » à une Alliance traitant de questions de sécurité qui dépassent largement les frontières de l’Europe.
La deuxième raison d’élaborer un nouveau concept stratégique est le besoin de faire comprendre à un plus large public ce que représente cette OTAN en transformation. Beaucoup ne comprennent pas bien les changements immenses que l’OTAN a connus depuis la fin de la guerre froide, ou n’en sont tout simplement pas conscients. Un nouveau document de base actualisé permettrait d’expliquer plus facilement ce qu’est l’Alliance et de renforcer le soutien du public, essentiel à la poursuite de son succès. Et j’ajouterai que cela n’intéressera pas uniquement l’opinion publique dans les pays alliés. Étant donné que les intérêts stratégiques de l’OTAN coïncident avec ceux d’un nombre de plus en plus grand de pays non membres de l’Alliance, je ne doute pas qu’un nouveau concept stratégique ferait l'objet d'un examen attentif dans ces pays‑là également.
La troisième raison, très importante, est que nous avons besoin d’un nouveau concept stratégique à des fins conceptuelles. Les exigences vis‑à‑vis de l’OTAN sont aujourd’hui plus grandes que jamais. Une vision claire du rôle et des tâches fondamentales de l’Alliance, mais aussi de ses limites, doit donc être définie d’urgence. Il ne sera pas facile de parvenir à une telle perception commune. Cela nécessitera un débat de fond, long et, sans aucun doute, parfois difficile, entre les Alliés. Mais nous devons nous soumettre à cet exercice, de manière à pouvoir prendre les décisions politiques nécessaires pour définir des priorités entre les nombreuses exigences qui sont posées – et qui continueront sans aucun doute d'être posées ‑ à notre Alliance, et pour identifier les ressources nécessaires en vue d’y répondre.
Telles sont les raisons pour lesquelles il nous faut établir un nouveau concept stratégique. Voyons à présent quel devrait être le contenu de ce document. Pour que le nouveau concept stratégique présente un véritable intérêt, il faut pour moi que les sept points clés que je vais exposer y soient traités.
Premièrement, le nouveau concept stratégique doit décrire clairement le nouvel environnement stratégique, y compris toutes les nouvelles tendances qui s'y rapportent, et offrir ainsi une base solide pour les réflexions qui devraient suivre. Cette description devrait donc porter non seulement sur le terrorisme, les États faillis et la prolifération des armes de destruction massive, mais aussi sur les incidences des cyberattaques en matière de sécurité, les interdépendances dans le domaine énergétique, la piraterie et les changements climatiques. En effet, il s’agit d’autant d’éléments du contexte volatile d'« insécurité globalisée » dans lequel l'OTAN doit trouver sa place et définir son rôle.
Deuxièmement, le nouveau concept stratégique doit définir clairement la notion de défense collective dans ce nouvel environnement de sécurité. Les défis du 21e siècle tels que les cyberattaques et les interruptions des approvisionnements énergétiques peuvent déstabiliser profondément un pays, sans recours aux armes. Ces défis n’appellent pas nécessairement des réponses militaires, ils exigent toutefois des réponses collectives de la part de tous les Alliés. Il me paraît donc essentiel de renforcer le concept de solidarité entre Alliés dans cet environnement de sécurité qui évolue rapidement, y compris dans un nouveau concept stratégique, et de donner à tous nos pays membres l’assurance qu’ils ne devront pas faire face seuls à ces défis.
Troisièmement, la transformation militaire. La défense territoriale collective restera bien sûr le principe tout à fait fondamental sur lequel repose l’Alliance. Mais aujourd’hui, la nécessité de déployer des forces vers des zones de crise éloignées, souvent à bref délai, est aussi importante que la nécessité de disposer des forces capables de défendre les frontières nationales. C’est pour cette raison que nous avons besoin de forces et de moyens capables de mener toute la gamme des opérations militaires, depuis le maintien de la paix jusqu’aux opérations de combat. Le nouveau concept stratégique devra poser cette exigence de manière parfaitement claire, mais il devra aussi indiquer comment il faudra y répondre. Et permettez-moi d’ajouter qu’avec la crise financière actuelle, le partage des charges et la répartition des coûts entre pays alliés pour que nous puissions atteindre nos objectifs en matière de transformation n’en seront que plus importants encore.
Quatrièmement, le nouveau concept stratégique doit mettre l’accent sur la notion d’«approche globale» et exposer l’engagement et la contribution de l’OTAN à l'égard de celle-ci. Notre expérience en Afghanistan montre clairement que les défis de sécurité d’aujourd’hui exigent l'application cohérente de mesures politiques, militaires, économiques ou autres, ainsi qu'un nouveau degré de coopération entre institutions internationales. La signature d’une déclaration commune OTAN-ONU l’année dernière constitue un grand pas en avant. Je suis également satisfait que nous ayons pu resserrer les liens avec l’OSCE et l’Union africaine, et entamer des discussions de travail avec la Ligue Arabe. À mon grand regret, des progrès moindres ont été accomplis dans l’établissement d’un partenariat OTAN-UE plus approfondi, et j’espère sincèrement qu’il sera possible de réaliser prochainement des avancées dans cette direction. Il faudra que cette question soit examinée sérieusement dans notre nouveau concept stratégique.
Fifth, a new Strategic Concept must reconfirm the consolidation of Europe as a long-standing, strategic objective of NATO. Over the past twenty years, the Alliance – together with the European Union – has played a major role in the creation of a European continent that is whole, free and at peace. We have come a long way towards that goal, but it is not a reality just yet. And so I believe that a new Strategic Concept should confirm NATO’s commitment to continue to engage countries all across Europe in political dialogue and practical cooperation – but also to keep its door open to countries who wish to join the Alliance, and who are able to meet its rigorous standards.
Sixth, and for that previous objective to be properly pursued, a new Strategic Concept must also address NATO’s relationship with Russia. Over the years, this relationship has seen ups and downs, and we have recently gone through a difficult phase. Russia currently appears to perceive that the West, and notably NATO, does not take fully into account its security concerns. And this is a perception that needs to be tackled – by NATO and by Russia. I strongly believe that we in NATO must continue to stress our interest in a genuine partnership with Russia; a partnership that encourages cooperation in the many areas where we have a common interest – from Afghanistan, to countering terrorism and proliferation -- but which also encourages frank discussion of more difficult issues. And I believe that our new Strategic Concept should reflect this.
Finally, a new Strategic Concept should reflect the growing importance of NATO’s partnerships with nations not just on or near the European continent, but around the globe. Today’s increasingly complex, global security challenges demand the broadest possible cooperation. I already mentioned our strong interest in working with other institutions in a comprehensive approach to tackle these challenges. I am convinced that we should also continue to engage other, individual nations – wherever they may be located on the map -- in finding common solutions to common problems. A new Strategic Concept should emphasise the importance of a NATO with global partners – as opposed to a global NATO.
Of course, these seven priorities for a new Strategic Concept that I have just outlined are by no means exhaustive. There are others, including identifying the importance of arms control and disarmament; and the Alliance’s role in humanitarian and disaster relief operations. And there is one further role for NATO that needs to be reinforced: as the key forum for political dialogue between all Allies, North American and European. I have emphasised this vital political role of NATO right from the beginning of my tenure as Secretary General. I believe that it will become even more important as we look for a new, solid transatlantic consensus on the many challenges before our Alliance.
This institution, the NATO Defense College, has played a major role within the Alliance as NATO has adapted to the post-Cold War strategic environment and the globalised insecurity of the past few years. Not only has the NDC been an invaluable part of the transformation process, but it has also contributed to it in a number of ways.
First of all -- a core task of the College right from its inception -- by informing and educating senior military officers and civilian personnel; bringing them along in the Alliance’s transformation; and allowing them, in turn, to pass on their knowledge and experience to their colleagues back home. In this way, the NDC plays a unique role in building the “human interoperability” between our military and officials that is so often essential in overcoming challenges. The Senior Course has been and remains the College’s main vehicle in this important effort, and so I am particularly pleased to be addressing the participants of Senior Course 114 today.
The fact that the Senior Course now includes more than just NATO country representatives points to the valuable second role of the NDC, which is in reaching out to NATO’s partner nations. And today, this goes well beyond what one might term as NATO’s traditional, Euro-Atlantic partners. My first visit here as Secretary General was in May 2004, when we still rather cautiously explored closer cooperation between NATO and its Southern neighbours. My Deputy, Ambassador Bisogniero, was here just two weeks ago to give the closing address at the first fully fledged NATO Regional Cooperation Course, with active participation not only by several of our Mediterranean but also some of our Gulf partners. I welcome that progress, and hope that we can continue to build upon it.
Finally, through the significant enhancement of the NATO Defence College’s research activities. I am particularly pleased by the way that these activities have been aligned with NATO’s agenda and made more directly applicable to the needs of practitioners. I have been very impressed with the scope of the Research Branch’s activities, the quality of the work already done, and the clear focus of its future projects. I am delighted to see the strong emphasis in its work programme on the definition of NATO’s longer-term role and responsibilities, and especially on the new Strategic Concept. As I prepare to leave NATO, I know that I can rely on this special and unique College to stay involved and make a most valuable contribution to that process.
Ladies and Gentlemen,
Last month, NATO celebrated its 60th anniversary as the most successful alliance in history. There are many reasons for that success. But one that stands out above all others is the common determination, and mindset, among nations to address security challenges together. In the past, this common mindset may have been shared only by the Allies. Today, however, that common spirit of security cooperation is shared by many nations – nations in the Euro-Atlantic area, in the Mediterranean and the Gulf regions, and even further beyond.
Since its inception in 1951, the NATO Defense College has been at the heart of NATO’s efforts to build and sustain this common mindset – to promote the common ideas, common approaches, and common values that underpin it and that have contributed to the Alliance’s success. I should therefore like to conclude by thanking the College most sincerely for the outstanding way it has accomplished these tasks – and by wishing all of you in this auditorium, and the NATO Defense College, the very best wishes for the future. Thank you.