Protéger le patrimoine de la Libye
La Libye possède un riche patrimoine culturel, des peintures rupestres paléolithiques, des ruines gréco-romaines et des oasis antiques. Ces richesses historiques, dont six sites du patrimoine mondial de l'UNESCO, ont été négligées pendant des années et récemment elles ont été exposées aux périls de la guerre.
Pendant le conflit en Libye, on a dit que des troupes pro-Kadhafi et des missiles étaient cachés dans l'antique cité de Leptis Magna, et que Kadhafi s'en servait comme bouclier archéologique. La présence de ce type de matériel faisait courir un risque considérable, mais les sites de Leptis Magna et Sabratha sont sortis indemnes du conflit. C'est une excellente nouvelle pour le patrimoine culturel de la Libye et pour le tourisme, dont le pays espère la reprise.
Le conflit n'est pas la seule menace à laquelle les vestiges de l'antiquité sont confrontés. Si l'ordre public venait à se dégrader, des malfaiteurs pourraient dérober des objets d'une grande importance. Lors d'un pillage, sans doute parmi les plus graves commis pendant le conflit, près de huit mille pièces d'or, d'argent et de bronze, ainsi qu'un petit nombre d'objets ont été volés dans la chambre forte d'une banque de Benghazi.
Dans certains cas, l'inventaire, l'archivage et le catalogage n'ont jamais été effectués, il est donc difficile d'estimer les pertes subies par le patrimoine culturel de la Libye. Mais, d'une manière générale, la Libye semble avoir évité les pillages culturels et le vandalisme qu'a connu l'Iraq après l'invasion.
Liste des endroits à ne pas attaquer
Dans le cadre d'une initiative inédite, deux hommes ont contribué à l'établissement d'une « liste des endroits à ne pas attaquer » recensant les sites culturels qui devaient être épargnés lors des opérations aériennes : Karl von Habsburg, président du Comité du bouclier bleu en Autriche, et Joris Kila, professeur à l'université d'Amsterdam et président de l'« International Military Cultural Resources Work Group ».
Les deux hommes sont revenus évaluer les dommages infligés au patrimoine libyen pendant le conflit. « Nous savons l'un et l'autre qu'en cas de conflit potentiel ou réel, il faut se rendre rapidement sur place,» explique Karl, «pour faire le point et voir ce que l'on peut faire immédiatement pour aider».
Les deux experts se sont vus accorder un accès spécial aux sites qui plusieurs mois auparavant avaient été scellés, méthode qui selon eux est essentielle pour protéger le patrimoine en période de troubles. Cette méthode est efficace pour les musées, mais la protection de sites comme Leptis Magna et Cyrène, qui sont à découvert, est beaucoup plus difficile.
Le travail qu'ils accomplissent comble le vide qui existe dans la protection du patrimoine jusqu'à ce que le gouvernement libyen puisse prendre la relève. « Nous espérons pouvoir encourager les libyens à assumer une partie de notre travail, » dit Joris, «et à faire ce qui doit être fait.»
Certains des sites qu'ils ont visités étaient proches des cibles des frappes aériennes et n'ont subi que des dommages superficiels. « Il semble que notre liste des endroits à ne pas attaquer s'est révélée très efficace, » fait observer Joris, «car nous n'avons pas constaté de dommages graves dus aux bombardements de l'OTAN sur les sites culturels.»
Retour au pays
Les archéologues internationaux ne sont pas les seuls à vouloir protéger les sites antiques de la Libye. Hafed Walda, archéologue libyen résidant au Royaume-Uni, est rentré au pays pour sauvegarder le patrimoine culturel de celui-ci.
« Ma famille est originaire de Misrata près de Lepsis Magna,» dit Hafed. « Ce site m'a toujours fasciné et lorsque j'ai eu l'occasion d'étudier l'art et l'architecture, j'ai voulu apprendre à le préserver pour les prochaines générations. »
Hafed pense que le grand problème qui se pose pour les sites culturels libyens est le manque de formation et de moyens de ceux qui sont chargés de les protéger. « Je vois certains sites qui sont négligés et marginalisés à un point tel que c'en est désespérant. Les gens ici n'ont pas les moyens et parfois ils n'ont pas le savoir-faire. »
Hafed passe par les médias pour faire entendre son message et il s'adresse aux organisations internationales en espérant qu'elles pourront apporter leur aide.
« Il faut absolument que la Libye s'identifie à son patrimoine, car c'est le patrimoine du monde et ainsi la Libye sera intégrée au monde. C'est une tâche immense, une tâche vraiment énorme et la Libye ne peut pas l'assumer seule. »
Sauvegarder le passé
La mission de l'OTAN en Libye – l'une des campagnes aériennes les plus réussies de l'Alliance – a pris fin le 31 octobre 2011. L'OTAN peut se féliciter d'avoir mené cette campagne sans avoir gravement endommagé les vestiges de l'Antiquité en Libye.
La coopération entre l'OTAN et d'autres acteurs clés, comme l'UNESCO, sera essentielle pour assurer la protection des biens culturels et historiques en période de troubles, conformément aux obligations juridiques internationales.